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Tous les jours, une question sur l’économie de la création et tous les mercredis une saga décryptée sur une entreprise qui cartonne 💡

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Par Hupster
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EssilorLuxottica, le GAFA des lunettes

👉 Ou comment l'avenir du Métavers passe par des Ray-Ban

🔎 Hello, aujourd’hui on avait envie d’y voir plus clair…et on a trouvé la saga parfaite pour cela : EssilorLuxottica. Le genre de saga dans laquelle on retrouve du mariage, de la trahison, des alliances et - évidemment - du gros succès. Qui pourrait même faire de l’ombre à Google et embellir l’avenir de Meta…

🧨 Au programme : 1 179 mots pour 5 ½ minutes de lecture. Enjoy ! David.


Ce qui est intéressant avec l’histoire d’Essilor, l’inventeur du verre progressif, c’est qu’elle dit tout de notre époque : ruptures technologiques, coups de génie marketing, aventure industrielle et stratégie capitalistique impitoyable…

Ou comment une marque centenaire, française puis européenne a su prendre les bons virages, s’associant même avec Meta pour mettre au point les Ray-Ban connectées. Et finir par être aux lunettes ce que Ticketmaster est aux concerts. On vous raconte tout ça (et on s’excuse d’avance pour les jeux de mots dans les titres).

Pourquoi faire compliqué…

La légende Essilor débute au milieu du 19ème siècle avec treize ouvriers lunetiers parisiens qui créent une coopérative, l'Association fraternelle des ouvriers lunetiers, devenue SL, puis Essel. Elle commence par fabriquer des montures mais très vite, elle se diversifie dans la production de verres correcteurs.

Il faut attendre un siècle (quand même) avant une première révolution industrielle dont personne ne veut et ne voit alors l’utilité, et un homme, Bernard Maitenaz, troisième génération de la famille Maitenaz qui travaille à la Société des Lunetiers. Et Bernard, lui, il veut tout changer.

Nous sommes après la Seconde Guerre mondiale, et cet ingénieur opticien passionné travaille dans son coin à une petite révolution technologique : un verre ophtalmique progressif qui va mettre fin aux doubles montures et aux doubles foyers. Il est le seul à y croire au début. Un premier brevet est déposé en 1953 mais ce n’est que six ans plus tard que les premiers Varilux sont commercialisés. Et il faut attendre quatre ans de plus pour que ce nouveau verre soit définitivement adopté.

« Il y a loin de l'idée au produit et du produit au marché, a raconté Bernard Maitenaz. Ce verre n'était absolument pas demandé, il allait à contre-courant de toutes les habitudes de la profession ».

En 1972, le Varilux est un succès énorme. L’ingénieur monte alors en grade et prend les commandes des équipes de recherche et de développement pour améliorer les verres progressifs qui souffrent encore de quelques défauts. 

La prochaine révolution sera capitalistique : SL se marie avec Silor et devient Essilor. C’est le début d’une croissance à l’international à coups de fusions et acquisitions.

On ne le sait pas encore mais ce mouvement est le premier acte d’une croissance frénétique. On peut noter plusieurs étapes, dans un schéma classique mais très efficace :

  • Essilor se recentre sur son cÅ“ur d’activités en rachetant des concurrents dans le domaine des verres ophtalmiques et en revendant dans le même temps ses activités connexes (compas, instruments de topographie, matériel de dessin…). Elle abandonne même les montures un peu plus tard.

  • L’entreprise ouvre des usines dans le monde entier et installe son propre circuit de distribution pour le maîtriser de bout en bout.

  • Elle poursuit ses efforts dans la recherche et le développement pour faire progresser ses verres progressifs, distancer la concurrence et devenir le leader mondial dans ce domaine. Ce qui arrive à la fin des années 80.

  • Elle rachète des sociétés spécialisées, monte des accords de licence et enquille des partenariats planétaires sans interruption durant toutes les années 2000 et 2010.

À noter que dans cette croissance, Essilor est volontairement restée une entreprise industrielle, créant de la valeur autant dans la recherche et le marketing que dans la production de ses usines. Une stratégie pas représentative de la désindustrialisation en marche à cette époque.

Tout cela nous emmène jusqu’en octobre 2018 et la dernière touche à la création d’un géant dominateur, limite monopolistique.


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Qu’Essilor, le plus grand fabricant de verres, s’allie à Luxottica, un des lunetiers les plus renommés, il y a quelque chose de logique ça. Pour cela, il a fallu l’aval de la Commission européenne. C’est fait en 2018 et le nouvel ensemble pèse 16 milliards de CA, 60 milliards de capitalisation boursière, 150.000 salariés et 9.000 magasins dans le monde entier.

Luxottica, c’est la marque italienne qui fabrique sous licences les lunettes de marque, Chanel, Pradel, Versace, Armani mais surtout Ray-Ban, c’est important, on le verra plus tard. Une marque créée de toutes pièces il y a 50 ans par Leonardo Del Vecchio, deuxième fortune d’Italie, décédé en 2022.

Cette fusion dans laquelle l’Italien a fini par prendre le pouvoir sur le Français, achève la mue d’une petite entreprise familiale en groupe impitoyable qui contrôle tout, les montures, les verres, la distribution. Et sait mettre la pression sur les opticiens pour mettre en avant ses produits. À la limite du légal puisque les deux entités, ensemble et séparément sont épinglées pour des pratiques commerciales entravant la concurrence ou des abus de position dominante.

Incontournable sur son marché, EssilorLuxottica est aussi en train de mettre la main sur le futur en l’amenant dans une autre galaxie. Et pour ça, il s’est allié avec un autre géant, du numérique cette fois, Meta. Leur point commun : la Ray-Ban. Luxottica a racheté la marque un peu tombée en désuétude, en 1999, et il l’a remise à la mode, au point que celle-ci pèse un quart de son chiffre d’affaires.

L’an dernier, c’est Ray-Ban qui a été choisi pour produire des lunettes connectées nouvelle génération en collaboration avec Meta. Pari un peu osé, on a encore en tête la manière dont les Google Glass avaient fait un four au milieu des années 2010. Mais cette fois, ça prend. C'est même l’un des rares objets connectés à rencontrer un certain succès commercial. Tous les autres s’y sont cassé les dents, même si ceux qui ambitionnaient de ringardiser le smartphone (coucou l’AI Pin).

C’est un enjeu pour EssilorLuxottica d’ouvrir un marché plein de promesses. C’en est un encore plus grand pour Meta de réussir son pari du Métavers. Parce que pour le moment, tout a floppé, notamment les casques de réalité virtuelle trop contraignants, trop chers, aux usages trop limités. Les usages des lunettes connectées le sont aussi, limitées, mais en s’appuyant sur le design iconique des Ray-Ban et des fonctions utiles, celles-ci permettent de creuser un sillon pour la première fois. A tel point que Meta envisage de devenir actionnaire d’EssilorLuxottica. Il faudrait bien ça pour créer un marché qui n’existe pas.


UN MOT DE NOTRE CHAÃŽNE YOUTUBE

Pour voir la version longue de notre interview avec David Castello-Lopes, une seule adresse : notre chaîne YouTube. David nous parle, pendant une demi-heure, de ses tout débuts, de sa première vidéo tournée à l’été 1996 ou encore de sa relation vis-à-vis de TikTok et des plateformes en général aujourd’hui.