🔎 Hello, vous savez qu’il n’est pas si fréquent que des outils numériques deviennent des noms communs ou des verbes. Je google, tu googles, il google, il eût fallu que nous le googlâmes… C’est le cas de Zoom qui a pris une telle place dans nos vies personnelles et professionnelles depuis le Covid qu’il est entré dans notre langage courant. Qui n’a pas fait des apéros Zoom ?
🖥️ Contrairement à ce qu’on pourrait penser, Zoom n’est pas sorti de nulle part à ce moment-là. Cet outil de visio existait depuis un moment, c’est juste qu’il a fallu cet épisode exceptionnel pour se rendre compte de ses qualités. Et tout ça, ce n’est pas dû au hasard non plus. Et c’est ce que je vais vous raconter aujourd’hui. On y va. Zoom Zoom Zen.
💥 Au programme : 1 313 mots pour 5 minutes de lecture. Enjoy, David !
Commençons cette histoire par ce que je préfère : chercher la légende. Et découvrons comment tout débute en Chine dans le milieu des années 80. À cette époque, en France, on ne jure que par le Minitel, mais cette révolution n’est pas parvenue dans la province du Shandong. En tout cas, pas jusqu’à Eric Yuan, un jeune étudiant en technologie et en électronique, qui rêve à bien autre chose.
Normal, il est amoureux. Problème, sa fiancée habite à dix heures de train. Le garçon est doué avec tous les appareils électroniques qu’il démonte et remonte pour en comprendre le fonctionnement. Et il a de l’imagination aussi. Alors pour rester en contact avec son amoureuse, il imagine déjà à quoi pourrait ressembler un visiophone. Nous sommes près de 25 ans avant que Zoom ne voit le jour mais l’idée est déjà là.
Quand on demande à Eric Yuan s’il est ok qu’on fasse un Zoom car on est bloqué en TT
Il va donc se passer beaucoup de choses entretemps. Et notamment une importante décision du jeune homme qui travaille pour plusieurs entreprises technologiques en Chine, mais n’y trouve pas vraiment son compte. Il ne parle pas vraiment anglais, mais il se dit qu’il maîtrise la langue technologique et qu’elle est universelle. Il décide donc de partir pour les États-Unis. Il s’y reprend à plusieurs fois pour obtenir un visa. Rejeté à chaque fois. Il finit par obtenir une promesse d’embauche une fois sur le sol américain et cette fois ça passe. L’entreprise qui accepte de le sponsoriser s’appelle Webex et c’est marrant, cette jeune startup est spécialisée dans la « conf call » et la visioconférence pour les entreprises.
Eric Yuan y fait ses premières armes. Et très vite, il devient l’un des meilleurs ingénieurs de l’entreprise. Mais il y a quelque chose contre lequel il ne peut pas lutter : il n’a de cesse de vouloir améliorer un outil qu’il n’a pas créé. Pour lui, il faudrait repartir de zéro et faire ce qui n’a jamais été fait jusqu’à présent : écouter les utilisateurs. Le logiciel qu’il doit défendre n’est pas du tout intuitif et la culture de l’entreprise n’est pas vraiment centrée sur l’écoute du client.
En 2007, le géant Cisco rachète Webex et Eric Yuan y voit l’occasion de présenter son plan radical : on détruit la maison et on refait les fondations avec l’aide des locataires. Son intuition est très précise : une plateforme entièrement nouvelle, adaptée aux smartphones, basée sur facilité d’utilisation, une connexion stable, reposant sur le cloud et ne nécessitant ni téléchargement ni inscription. Eric Yuan n’a rien inventé, c’est ce que ses clients lui demandent de faire.
Mais chez Webex, il n’y a pas de raison de tout remettre à plat quand les dollars coulent à flots. Les boss de Cisco ne voient pas l’utilité de développer un produit destiné selon eux au grand public alors qu’il y a déjà Skype. Eric Yuan pense au contraire qu’il y a une place à prendre. Alors il décide de mettre ses convictions au service de son entreprise à lui. Il démissionne et monte sa propre boîte.
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Les premiers pas sont compliqués. Quand Eric Yuan explique son plan à des investisseurs, on lui répond la même chose : il y a déjà Skype, FaceTime, Hang-out, Webex… Pourquoi un nouvel acteur ? Nous sommes en 2011 et l’ingénieur parvient à réunir un tour de table pour lancer son entreprise et début 2013, sa plateforme de visioconférence voit le jour. Elle s’appelle Zoom.
Eric Yuan bâtit l’outil qu’il avait en tête : simple, facile à utiliser, convivial, stable… Il fait le pari que l’innovation qui fonctionne le mieux, c’est celle qui ne se voit pas. Par manque de moyens marketing, il fait le pari aussi que c’est le bouche-à-oreille qui sera son meilleur allié.
Zoom fait rapidement son trou. Il faut dire qu’Eric Yuan paye de sa personne et il va même répondre en personne aux mauvais commentaires pour essayer de comprendre et d’améliorer sa solution. Très vite, Zoom atteint le million d’utilisateurs et les entreprises commencent à l’utiliser. Mais l’app reste encore bien loin du mastodonte Skype.On est d’accord que PERSONNE n’a d’aussi jolis fonds chez soi pour ses conf-calls ?
Et puis survient le Covid. La demande en visioconférence explose et bon nombre d’utilisateurs obligés de travailler à domicile se rendent compte à quel point les solutions de visioconférence sont complexes ou pas du tout à la hauteur des enjeux. Alors qu’il n’a jamais été aussi simple de se connecter par Zoom, et tout le monde se passe le mot : il suffit de cliquer sur un lien et ça marche. Pratique quand il s’agit de travailler confinés ou de garder contact avec ses grands-parents. Même les grandes entreprises s’y mettent.
Les chiffres explosent : en mars 2020, Zoom est téléchargé 2,13 millions de fois en une journée ; en avril 2020, Zoom dépasse les 300 millions de participants aux réunions quotidiennes. Et les abonnements aux solutions payantes suivent. C’est à ce moment que Zoom passe dans le langage courant. Parfois de façon péjorative puisqu’on finit par parler de « Zoom fatigue ».
Avec le succès viennent aussi les ennuis et apparaissent les faiblesses. Il est ainsi facile de se connecter à des réunions pour venir les perturber (on appelle ça le Zoom-Bombing) et il faut alors rapidement renforcer la sécurité et la confidentialité des connexions.
La pandémie passée, le télétravail devient dans un premier temps une norme dans les entreprises et Zoom en profite pour s’installer. Mais le travail à distance est de plus en plus remis en question. Et les raisons d’utiliser la visioconférence également. Il en faudrait peu pour que, ce qui a contribué au succès de Zoom ne se retourne contre lui.
Depuis quelque temps, la tendance est au désabonnement, notamment chez les petites entreprises qui étaient les clientes les plus rentables. Alors désormais, Zoom se concentre sur les outils qu’elles offrent aux professionnels comme les systèmes téléphoniques ou les centres de contacts, et s’intéresse à tous les échanges qui se produisent au sein d’une entreprise.
Son credo est toujours la simplicité mais appliquée à des fonctions précises. Et à grande échelle. Zoom a ainsi permis d’organiser des événements politiques d’envergure, notamment avec des groupes organisant des collectes de fonds et soutenant la vice-présidente Kamala Harris. Et elle vient de lancer une nouvelle offre de webinaire à usage unique qui peut accueillir jusqu'à 1 million de participants.
Forcément, Zoom regarde du côté de l’IA. Dans une interview avec Nilay Patel, le rédacteur en chef de The Verge, Eric Yuan raconte comment il compte nous créer grâce à l’IA une sorte de jumeau numérique professionnel destiné à aller en réunion à notre place, à prendre aussi un certain nombre de décisions à notre place aussi, afin de nous dégager du temps pour se consacrer à autre chose. Et pas forcément professionnelle.
Cette vision pose pas mal de questions, à la fois techniques et éthiques : de quoi se nourrit cet avatar pour devenir moi ? Est-ce que lire mes mails et mes échanges suffit à me connaître, à en déduire quelles décisions je pourrais prendre ? Mes collègues doivent-ils savoir qui ils ont en face d’eux ? Doivent-ils savoir que je suis à la plage au lieu d’être avec eux ?
L’histoire ne dit pas si Eric Yuan compte utiliser son avatar pour parler en visio à sa petite amie devenue sa femme et la mère de leurs 3 enfants…
UN MOT DE NOTRE CHAÎNE YOUTUBE
Il y a 10 ans, Justine Le Pottier est l’une des plus grosses stars de YouTube en France. Figure du collectif Golden Moustache, les vidéos dans lesquelles elle apparaissait faisaient parfois plus de 15 millions de vues. Aujourd’hui, dans un nouvel épisode de nos entretiens hebdomadaires sur notre chaîne Youtube, Justine revient sur cette période dorée des tout débuts de l’humour sur le web et se verrait bien, pourquoi pas, recommencer… On a aussi parlé théâtre, cinéma, écritrue… et c’est à retrouver ici.