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Par Hupster
28 août · 5 mn à lire
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Comment Politico s’est implanté en France

👉 Les secrets derrière LA newsletter politique la plus lue de France

🔎 Hello, on vous emmène cette semaine dans les coulisses d’une newsletter (très, très) politique qui en 3 ans est passée de 0 à 50 000 abonnés tout rond : « Playbook Paris » de Politico.

🧐 Où l'on apprend que le plus dur a été de trouver le bon journaliste politique qui décroche des scoops tard le soir.

🧨 Au programme : 1 544 mots pour 6 minutes de lecture. Enjoy ! David.


Arrivé en France en 2021, juste avant la campagne pour l’élection présidentielle, Politico s’est fait une place très rapidement avec « Playbook Paris », sa newsletter matinale phare qui donne le ton du monde politique français et qui compte désormais 50.000 abonnés.

À partir de là, Politico a su installer son modèle hybride original, à la fois destiné au grand public et aux professionnels des politiques publiques. Une offre qui va s’enrichir dans quelques semaines d’une nouvelle rubrique sur la tech.

On est revenu avec Marion Solletty, rédactrice en chef pour la France chez POLITICO Europe, sur la stratégie mise en place pour réussir cette greffe française.

Malgré les apparences, cette aventure couronnée de succès n’a pas commencé dans un sous-sol (ici avec Marion Solletty, micro en main) // © POLITICO

Le moment où on a décidé de se lancer en France

Je n’étais pas au début de Politico à Bruxelles mais je suis arrivée rapidement dans l’équipe. J’ai commencé comme reporter et comme dans toute petite entreprise qui grossit, il y a rapidement eu des besoins d'encadrement et donc je suis devenue éditrice.

J’étais LA Française de la salle des éditeurs et quand on a commencé à parler du « plan France », on s’est naturellement tourné vers moi. Mes chefs de l’époque, Stephen Brown, et Shéhérazade Semsar de Boisséson, avaient en tête la présidentielle de 2022, ils pensaient que c’était le bon moment pour se lancer en France. C’était le bon moment pour Politico aussi qui arrivait au stade de la maturité puisque rentable sur le périmètre Europe. On venait de faire un lancement avec succès au Royaume-Uni à la faveur du Brexit. On voulait continuer sur cette dynamique.

Se lancer en France était un défi important pour nous car c'était le premier gros marché non anglophone dans lequel nous proposions une offre. On avait plein d'interrogations : par quel bout on prend le projet ? Est-ce qu’on suit le même scénario pour que pour les autres capitales ? Est-ce que le ton Politico va prendre en français, comment on va se l'approprier, etc ?

On voulait commencer avec le lancement de « Playbook », qui est notre newsletter phare dans toutes les capitales où Politico s'est implanté. C’était une évidence de commencer par ça. Alors fin 2019, j’ai commencé une période de pré-recrutement en rencontrant plein de gens, dont beaucoup ne comprenaient pas vraiment ce que je voulais faire, qui ne savaient pas vraiment ce qu’était une newsletter. Il est vrai que le journalisme politique n'est pas forcément le plus technophile.

Le recrutement était une étape essentielle. Je savais ce que je cherchais, mais je savais que ça n'allait pas être facile à trouver, parce que ce sont des profils assez spécifiques. Quelqu’un d'assez senior pour boucler une newsletter tard dans la nuit, tout seul, et être assez confiant dans ses décisions, dans ses sources, etc. Quelqu’un avec une vraie patte dans l’écriture, capable de réinventer le journalisme politique et d’avoir des infos bien à elles… Quand j’ai rencontré Pauline de Saint-Rémy, je me suis dit rapidement que c’était la bonne personne.


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Le moment où on a lancé « Playbook Paris »

Avant de se lancer, on a fait plusieurs semaines à blanc. On a travaillé comme on le fait pour tout nouveau produit éditorial, pour définir nos rubriques, la structure et surtout notre ton. L'humour, cette envie de ne pas se prendre trop au sérieux, c’est très important pour nous, mais ça doit se distiller à bonne dose. On ne veut pas s'auto caricaturer non plus.

Et puis, à un moment, il a fallu se lancer. Et là, les gens qui nous ont lu ont tout de suite aimé. En revanche, beaucoup d’autres ont mis du temps à nous découvrir. Il faut dire qu’on n’a pas fait de marketing, c’était beaucoup du bouche à oreille, des gens qui se refilaient un petit peu le truc sous le manteau.

Pauline de Saint Remy, THE plume derrière les scoops qui s’est couché tard le soir pour lancer la newsletter // © DR

Très vite, on est devenu très lus dans les rédactions politiques. On a eu un côté prescripteur, les journalistes parlaient de nous, s'inspiraient de nos angles… Ils nous lisaient tous les matins pour savoir ce qu’on avait comme infos.

Et puis, avec la rentrée politique juste avant la campagne électorale, il y a eu une accélération. Beaucoup de nos lecteurs nous ont découvert à ce moment-là et l’habitude de lecture est restée.

Le moment où il a fallu s’imposer

Une campagne électorale, c’est un moment où à la fois, tout le monde a les yeux rivés sur la politique mais un moment aussi où il va y avoir une offre importante et il faut se démarquer. On s’est vraiment retrouvé en concurrence frontale avec tous les services politiques. À ceci près que nous avons un créneau unique, très spécifique: on est publié tôt le matin pour parler de la journée à venir, on est après la presse et avant les matinales, on a des scoops, on raconte les coulisses de ce qui va se passer.

On est très conscient de cet avantage et on l'utilise beaucoup. On sait que, tard le soir, entre 22h et minuit, il n'y a plus beaucoup de journalistes qui appellent des sources. Il y a nous. Et nos sources le savent aussi.

C'est très dur de faire une quotidienne comme ça, de valeur ajoutée tout le temps. On avait peu de ressources. Forcément, il y a eu des moments où on s'est retrouvés en galère, mais pas parce que notre modèle ne fonctionnait pas, mais parce qu'on n'était peu nombreux. Pauline de Saint-Rémy a beaucoup porté sur ses épaules à ce moment-là. Mais on a toujours réussi à donner le change et à surmonter ces difficultés. Et puis, petit à petit, l'équipe a grossi, elle s'est structurée. Maintenant, ce n'est plus une personne seule, c'est vraiment une équipe.

Au début, vous n'avez rien à perdre. Désormais, on est attendu au tournant. Quand on a un bug technique et qu'on arrive une heure trop tard dans les boîtes, on est inondé de messages. Et si on écrit des choses qui ne plaisent pas à tout le monde, on reçoit des coups de fil très tôt. La pression est plus forte, on a une place à défendre.

Le moment où on s’est diversifié

On sait très bien qu'une offre comme « Playbook », c'est génial, mais pour nous, c'est une porte d'entrée vers un service d'information plus complet.

On a donc enchaîné assez vite avec le reste de notre programme, en développant la partie BtoB pour abonnés, avec le lancement en 2022 de « Paris Influence » destiné à couvrir les enjeux de pouvoirs et d'influences en politique, d'intersection entre l'argent et la politique. Les abonné·es de « Paris Influence » bossent dans les affaires publiques, dans les affaires institutionnelles, dans les grandes entreprises, les fédérations, les lobbies de toutes sortes, les agences de régulation, les ministères…

La petite soeur de « Playbook » a un nom : « Influence » // © POLITICO

On a fait un choix qui était pour le coup assez nouveau pour nous: lancer un produit plutôt horizontal, pas sectoriel, parce qu'on voulait prendre la température, voir comment ça allait marcher et ça devait nous permettre d’explorer certains sujets comme la transition écologique ou la transition numérique, afin de voir si ça prenait…

Quasiment tous nos lecteurs pros lisent déjà « Playbook ». Ça a été un peu une carte de visite, pour nous de dire qu'ils aiment le ton, la manière dont on fait l'info dans cette newsletter-là. On a fait aussi des choses plus grand public, des séries d'interviews, des événements, notamment sur la campagne des Européennes. Ça nous permet d'élargir notre base. Résultat, sur les douze derniers mois, on a franchi un cap en termes de notoriété auprès du grand public. Même si on n'a pas vocation à faire de l'audience de masse.

Le moment où on s’est diversifié

En avril dernier, nous avons poursuivi notre diversification en lançant une nouvelle offre d’information sur une verticale cette fois, à savoir les sujets de transitions énergétique et climatique en France. C'était un secteur bien identifié sur lequel on avait commencé à labourer le terrain. Donc, elle a trouvé son public de suite.

Et à l’automne, nous allons enchaîner avec une offre sur la tech où nous sommes très attendus par nos lecteurs sur les enjeux de régulation des GAFAM, des réseaux sociaux, sur tous les grands enjeux du numérique. On est en train de boucler le recrutement. 

Notre ambition, c’est de couvrir tous les enjeux de politique et de législation de la tech, en étant très en amont du cycle. C’est ce qu'on apporte par rapport à la plupart de nos concurrents un peu moins en capacité de sortir des infos très en amont des textes ou des réglementations. Nous sommes sur les signaux faibles qui finiront par donner lieu à de la régulation et nous sommes très bien placés pour détecter ces signaux parce qu'on est au cœur de l'écosystème politique.

C’est ce qui fait aussi qu'on est unique. Nous sommes à la fois grand public et BtoB, et ces deux côtés se nourrissent mutuellement, ça nous permet de jouer sur des créneaux où les autres ne sont pas. Le gratuit est une locomotive pour la zone abonnés. Et inversement, par le payant, nous arrivons à ramener des infos exclusives qui nourrissent toutes nos offres, y compris gratuites.

Dans les mois qui viennent, nous allons faire davantage d’événements sectoriels sur les grands enjeux de l’année, dans les domaines de la transition énergétique et de la régulation du numérique. Et on aura aussi des surprises à l’automne pour les fans de « Playbook ».


UN MOT DE NOTRE CHAÎNE YOUTUBE

Cette semaine sur notre chaîne YouTube, on profite du carton au cinéma de Vice-Versa 2 pour vous raconter l’histoire du plus grand studio d’animation au monde : Pixar. Fondé par un certain Steve Jobs, on lui doit des monuments du cinéma comme Toy Story, Là-Haut, Wall E ou encore Ratatouille et vous allez voir, rien n’était gagné d’avance. Pour ne rien manquer, abonnez-vous.